Loi PACTE et Innovation – Episode 3 : retour sur les dispositions relatives aux chercheurs-entrepreneurs

par | Sep 14, 2020

Claire Hellio, Professeure des Universités à l’Université de Bretagne Occidentale (UBO), et Marc Antonini, Directeur de recherche au Laboratoire d’Informatique, Signaux et Systèmes de Sophia Antipolis, ont reçu le 14 novembre la médaille de l’innovation du CNRS.

La loi PACTE, volonté forte de dynamiser et d’intensifier les liens entre recherche publique et secteur privé. Objectifs ? Lever les freins à l’aventure entrepreneuriale : simplifier les procédures, capitaliser sur la diversité des situations, fluidifier les passages d’un dispositif à l’autre et sécuriser le parcours des chercheurs souhaitant se lancer dans l’aventure entrepreneuriale

Loi PACTE

Le secteur des nouvelles technologies et la recherche publique sont créateurs d’emploi et participent – à leur niveau – à la croissance économique française. Pour accroître les échanges entre le monde de la recherche et les entreprises, la loi sur l’innovation et la recherche de 1999, dite « loi Allègre », a établi trois dispositifs permettant de favoriser le transfert de technologies de la recherche publique vers les entreprises en instaurant un cadre qui permet aux chercheurs de créer ou de participer à la vie d’une jeune entreprise innovante, en parallèle de leur emploi dans un laboratoire public.

Malgré cela, un très faible pourcentage de chercheurs a sollicité une autorisation pour bénéficier de l’un des dispositifs de participation à la création d’entreprise (soit moins de 0,01 % des personnes travaillant dans la recherche publique chaque année). Qui plus est, on constate que seulement 0,8% des chercheurs agents de la recherche publique sont recrutés par les entreprises. Ces chiffres confirment que des freins à l’aventure entrepreneuriale bloquent les chercheurs.

Dans la continuité d’une série d’interviews, Audrey GARCIA-COUSTEAU, Juriste à la SATT Sud-Est, corédige cette série d’articles. Concernant les nouveautés en termes de législation et d’innovation, Anaïs PIERRI DE MONTLOVIER, Juriste droit des affaires & licensing au sein de la SATT Sud-Est, répond aux questions concernant les chercheurs-entrepreneurs.

Au menu de l’épisode 3 : personnels de recherche et implication en entreprise/start-up, quelles possibilités ?

Anaïs, quels sont les principaux dispositifs des personnels de recherche dans l’entreprise ?

Depuis la loi Allègre de 1999 sur l’innovation et la recherche, il existe trois principaux dispositifs que je vais vous détailler :

Le premier, la création d’entreprise par des personnels de recherche (appelé « Article 25-1 ») permet aux chercheurs d’un laboratoire public de participer à la création d’une start-up en tant qu’associés ou dirigeants pour valoriser les travaux de la recherche qu’il ou elle a réalisé dans l’exercice de ses fonctions au sein du laboratoire public,

Le second, ou concours scientifique (appelé « Article 25-2 ») permet aux chercheurs d’apporter leur concours scientifique à une entreprise existante et de participer au capital de celle-ci1. Le/la chercheur.se est autorisé.e par sa hiérarchie à apporter son concours scientifique au sein d’une entreprise, nouvellement créée ou non, valorisant ses propres travaux de recherche,

Enfin, la participation à la gouvernance d’une société anonyme (appelé « Article 25-3 ») permet aux chercheurs de participer au capital de l’entreprise en gardant leurs fonctions et en participant uniquement au conseil d’administration ou de surveillance. La présence d’un.e chercheur.se rattaché.e à un laboratoire public au sein de la gouvernance de l’entreprise innovante permet de sensibiliser les organes de direction de celle-ci aux progrès de la recherche et de favoriser la diffusion des résultats de la recherche publique.

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1 Articles L531-8 à L531-11 du Code de la Recherche

Quels sont les principales évolutions suite à la loi PACTE ?

La loi PACTE comporte diverses mesures qui actualisent les dispositifs introduits par la loi Allègre afin de favoriser le rapprochement recherche publique/entreprises et vient notamment assouplir certaines règles de création d’entreprise pour les chercheurs.

La première évolution porte sur l’assouplissement de la procédure d’autorisation préalable. Avant la loi PACTE, les candidatures des chercheurs étaient soumises à une commission de déontologie qui devait statuer sur l’existence ou non d’un conflit d’intérêt entre l’activité publique du chercheur et l’activité privée envisagée. Avec la loi PACTE, cette procédure a été simplifiée : la saisine de la commission de déontologie n’est plus obligatoire et l’établissement employeur est désormais en mesure d’émettre directement cette autorisation permettant au chercheur de créer ou de prendre part à la vie d’une entreprise.

Une seconde évolution concerne les modalités liées au temps de travail du chercheur au sein de l’entreprise. Auparavant lorsqu’un chercheur optait pour le dispositif de la création d’entreprise, il était nécessaire que le chercheur arrête toute activité au titre du service public. Dorénavant, le chercheur peut choisir d’être détaché à temps plein ou à temps partiel, et donc continuer d’exercer une activité au titre de la fonction publique. Il sera en mesure de poursuivre certaines fonctions dans son établissement de recherche pour un volume d’heures défini et fixé dans l’autorisation. La Loi PACTE a augmenté la quotité de temps de travail qui peut être consacrée par le chercheur à une entreprise. Il est donc possible pour le chercheur de consacrer jusqu’à 50% de son temps à l’entreprise en parallèle de ses travaux de recherche au sein du laboratoire.

Enfin, une évolution supplémentaire concerne la prise de participation dans le capital de l’entreprise. Lorsque l’autorisation concédée au chercheur-entrepreneur arrivait à son terme, deux options étaient envisageables : le chercheur devait soit céder ses parts dans un délai d’un an, soit opter pour le troisième dispositif (participation à la gouvernance d’une entreprise) afin de poursuivre son activité dans l’entreprise. Avec la loi PACTE, le chercheur est désormais disposé à conserver une participation dans le capital de l’entreprise qui peut aller jusqu’à 49% du capital lorsqu’il décide de réintégrer le service public de la recherche.

Pour une présentation plus détaillée de ces trois dispositifs avec les apports de la loi PACTE, se référer à la rubrique ci-dessous « pour aller plus loin ».

Anaïs, pourrais-tu nous détailler la raison de telles évolutions ?

La loi PACTE marque une volonté forte de dynamiser et d’intensifier les liens entre recherche publique et secteur privé afin d’inciter les fonctionnaires chercheurs à concrétiser leur souhait de prendre part à l’aventure entrepreneuriale.

Pour ce faire, les évolutions apportées par la loi PACTE ont pour objectifs de lever les freins à l’aventure entrepreneuriale : simplifier les procédures, prendre en compte la diversité des situations existantes, fluidifier les passages d’un dispositif à l’autre et enfin sécuriser le parcours des chercheurs souhaitant créer ou participer à la vie d’une entreprise parallèlement à leur activité dans le public.

A retenir, je dirais que la loi PACTE répond à l’objectif de développer la mobilité en entreprise chez les chercheurs publics en introduisant une plus grande souplesse entre les dispositifs et une plus grande souplesse à la sortie de ces dispositifs.

Portrait de Audrey Garcia Cousteau

Anaïs PIERRI DE MONTLOVIER, Juriste droit des affaires & licensing au sein de la SATT Sud-Est

 

 

 

 

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